L’Autorité de la concurrence a prononcé le 15 /03/2024 contre Google une sanction de 250 millions d’euros pour non-respect de ses engagements. On se souvient que la loi n° 2019-775 du 24 juillet 2019 transposant la directive 2019/790 du 17 avril 2019 avait introduit en faveur des acteurs de la presse en crise un partage de la valeur avec les grandes plateformes numériques hautement lucratives qui parasitent leurs contenus et revenus publicitaires. Cela fait donc 5 ans que Google se moque de la réglementation nationale et communautaire relative aux droits voisins des éditeurs de presse et pratique des mesures dilatoires en feignant de bien vouloir partager de bonne foi ses revenus avec les créateurs de contenus.
L’Autorité avait prononcé le 9 avril 2020 des mesures d’urgence sous forme d’injonctions visant à contraindre Google à mettre en œuvre une négociation de bonne foi en vue de formuler une proposition financière pour l’utilisation des contenus protégés des éditeurs et agences de presse. Ayant constaté que ces dernières n’avaient pas été respectées, elle avait sanctionné Google le 12 juillet 2021 à hauteur de 500 millions d’euros et l’avait enjointe de se conformer, sous astreinte, aux injonctions initialement prononcées. L’Autorité avait accepté le 21 juin 2022 les engagements proposés par Google et agréé le cabinet Accuracy en qualité de mandataire en charge du suivi et du contrôle de la mise en œuvre de ses engagements. Dans sa décision du 15 mars 2024, l’Autorité sanctionne Google pour avoir méconnu son engagement de coopération avec le mandataire et pour ne pas avoir respecté quatre de ses sept engagements :
- conduire des négociations de bonne foi, sur la base de critères transparents, objectifs et non discriminatoires dans un délai de trois mois ;
- transmettre aux éditeurs ou agences de presse les informations nécessaires à l’évaluation transparente de leur rémunération au titre des droits voisins ;
- prendre les mesures nécessaires pour que les négociations n’affectent pas les autres relations économiques existant entre Google et les éditeurs ou agences de presse.
L’Autorité relève que Google a non seulement manqué de diligence dans la transmission de ses notes méthodologiques, mais également que celles-ci revêtent un caractère opaque et ne permettent pas aux parties négociantes de reconstituer les propositions financières de Google. Google a pu ainsi maintenir les parties négociantes dans une situation d’asymétrie d’informations, et de ce fait obérer leur capacité de négociation alors que les engagements visaient précisément l’inverse.
L’Autorité considère par ailleurs que Google a réduit l’assiette de rémunération des éditeurs et agences de presse en sous-évaluant les revenus indirects résultant de l’attractivité apportée aux services de Google par l’affichage de contenus de presse protégés et en excluant toute forme de rémunération pour l’affichage de titres d’articles de presse.
L’Autorité souligne enfin que Google a manqué à son engagement de coopération avec le mandataire, notamment en s’abstenant de lui partager la totalité des informations nécessaires pour lui permettre d’exercer sa mission de contrôle des engagements. L’Autorité relève, par ailleurs, que Google a aussi tenté de différer le moment auquel l’Autorité serait informée en cas de doute du mandataire concernant un éventuel manquement.
Google avait sollicité de l’Autorité le bénéfice de la procédure de transaction, en application du III de l’article L. 464-2 du code de commerce. Celle-ci permet à une entreprise qui ne conteste pas les faits qui lui sont reprochés d’obtenir le prononcé d’une sanction pécuniaire comprise dans une fourchette fixant les montants maximal et minimal de la sanction qui pourrait être prononcée. Dans le cadre de cette procédure négociée, l’Autorité a prononcé une sanction de 250 millions d’euros.
Force est de constater à nouveau que la violation des droits des tiers est dans l’ADN de Google et la pierre angulaire de son modèle économique depuis sa création.