Le nouveau rapport de l’Observatoire européen de l’audiovisuel synthétise les dispositions réglementaires régissant les communications commerciales audiovisuelles (CCA) en Europe, telles qu’encadrées par la Directive sur les Services de Médias Audiovisuels (SMA) et transposées dans les législations nationales (protection des mineurs, alcool, tabac, placement de produit, codes de bonne conduite, etc.)
La réglementation de la publicité audiovisuelle en Europe est principalement façonnée par la Directive SMA qui établit un cadre pour assurer la protection des consommateurs tout en tenant compte de l’importance économique de la publicité pour les SMA.
Selon l’article 1(1)(h) de la Directive SMA, une communication commerciale audiovisuelle (CCA) est définie comme : « des images, sonorisées ou non, qui sont destinées à promouvoir, directement ou indirectement, les marchandises, les services ou l’image d’une personne physique ou morale qui exerce une activité économique ; ces images accompagnent un programme ou une vidéo créée par un utilisateur ou y sont insérées, moyennant paiement ou autre contrepartie ou à des fins d’autopromotion. Les formes de communications commerciales audiovisuelles comprennent, entre autres, la publicité télévisée, le parrainage, le téléachat et le placement de produit. »
Techniques publicitaires interdites
Un principe fondamental est que les CCA doivent être facilement identifiables. La directive interdit donc :
- Les CCA clandestines : La plupart des pays ont transposé littéralement cette interdiction. Quelques pays (DK, FI, NL, PT, SE) se contentent d’obliger à rendre les CCA clairement reconnaissables.
- Les techniques subliminales : Cette interdiction a été transposée littéralement par presque tous les pays. La législation de certains pays, comme la Bulgarie et la Hongrie, définit ces techniques comme des méthodes qui ne peuvent être perçues par la conscience mais qui peuvent influencer le subconscient.
Principes éthiques
- Dignité humaine : Une disposition universellement mise en œuvre.
- Non-discrimination : La plupart des pays ont adopté la liste des motifs de la directive (sexe, origine raciale ou ethnique, nationalité, religion, handicap, âge, orientation sexuelle). Certains l’ont élargie pour inclure la langue, les opinions politiques ou le statut social.
- Santé et sécurité : La plupart des transpositions sont littérales, mais plusieurs pays précisent les comportements interdits (par exemple, des comportements dangereux ou irresponsables au Danemark).
- Protection de l’environnement : La transposition est majoritairement littérale. La Slovénie y ajoute la protection du patrimoine culturel.
- Protection des mineurs : Bien que la transposition soit souvent littérale, des pays comme l’Irlande, les Pays-Bas, la Pologne, la Slovaquie, l’Italie et Malte ont mis en place des instruments étendus, notamment des codes de conduite détaillés.
Réglementation par catégorie de produits
Tabac et produits connexes
L’article 9(1)(d) de la Directive SMA interdit « toutes les formes de CCA pour les cigarettes et autres produits du tabac, ainsi que pour les cigarettes électroniques et les flacons de recharge ».
- Transposition : Tous les pays ont transposé cette interdiction de manière quasi littérale.
- Règles additionnelles : Neuf pays ont établi des règles plus détaillées. Certains étendent l’interdiction aux substituts du tabac et aux produits à base de plantes (FI, LV, NO, PL, RO, SE, CH, ES, LT).
Boissons Alcoolisées
Les articles 9(1)(e), 9(2) et 22 de la Directive SMA stipulent que les CCA ne doivent pas cibler les mineurs ni encourager une consommation immodérée.
- Transposition : L’interdiction de cibler les mineurs est transposée par tous les pays. Les critères de l’article 22 (ne pas lier l’alcool à la performance physique, au succès social/sexuel, etc.) sont mis en œuvre quasi unanimement.
- Interdictions nationales : Certains pays interdisent totalement la publicité pour l’alcool (IS, NO) ou sur certains supports (FR, LT, SE pour la TV/VOD/PPV). D’autres interdisent la publicité pour des types spécifiques d’alcool (par ex., les alcools forts en Finlande).
- Mesures de protection : De nombreux pays imposent des règles détaillées, telles que l’âge minimum (souvent 25 ans) pour les acteurs dans les publicités pour l’alcool (NL, MT, SI) et des heures de diffusion restreintes (watersheds), comme en Espagne (après 20h30 ou 01h00 selon le degré d’alcool).
Médicaments et Traitements Médicaux
L’article 9(1)(f) interdit les CCA pour les médicaments et traitements médicaux disponibles uniquement sur ordonnance.
- Transposition : Tous les pays ont transposé cette interdiction. La Suisse interdit même toute publicité pour les produits thérapeutiques et les traitements médicaux.
- Règles étendues : Quinze pays vont au-delà de la directive, en interdisant la publicité pour d’autres produits ou services comme les activités de santé (AT, EE, SI) ou les médicaments vétérinaires sur ordonnance (PL, FR, SK).
- Publicité autorisée : Lorsqu’elle est autorisée, la publicité pour les produits médicaux est soumise à des exigences strictes, comme en Slovaquie, où le code de conduite interdit d’impliquer qu’un examen médical est inutile, de présenter des témoignages de célébrités, ou de suggérer qu’un produit est sans effets secondaires.
Règles applicables aux radiodiffuseurs
Reconnaissance et distinction des CCA (Article 19)
Les CCA doivent être facilement reconnaissables et distinguées du contenu éditorial par des moyens optiques, acoustiques et/ou spatiaux.
- Niveau de détail : Alors que 15 pays ont transposé l’article de manière quasi littérale, 17 ont introduit des règles plus détaillées.
- Variations nationales :
- Portée : Le Danemark étend ces règles aux services à la demande.
- Formats spécifiques : L’Allemagne et l’Autriche réglementent les “publicités longues” (Dauerwerbesendung). L’Allemagne, la Finlande et le Portugal autorisent les “écrans partagés” (split screens) à condition que la distinction reste claire.
- Étiquetage : Plusieurs pays exigent un étiquetage visuel clair, tel que “Publicité”, “Werbung” ou “Pubblicità”.
Intégrité des programmes (Article 20)
La directive protège l’intégrité des programmes en limitant les interruptions publicitaires. Les films et les journaux télévisés ne peuvent être interrompus qu’une fois par tranche de 30 minutes. Les programmes pour enfants ne peuvent pas être interrompus par du téléachat, et les services religieux ne peuvent être interrompus du tout.
- Niveau de détail : Dix-neuf pays ont imposé des règles plus strictes que la directive.
- Variations nationales :
- Protection des mineurs : Des règles plus strictes s’appliquent dans plusieurs pays, interdisant parfois toute interruption pendant les programmes pour enfants (NO, SE, MT).
- Programmes protégés supplémentaires : Certains pays interdisent les interruptions pendant les retransmissions d’événements officiels (BG, HU, LV, UK) ou les journaux télévisés (BE-Flandre, IS).
- Fréquence des interruptions : La France et la Pologne ont des règles spécifiques selon la nature du programme (films, séries, documentaires). Le Royaume-Uni module la fréquence en fonction de la durée du programme et du type de chaîne.
- Pauses naturelles : Des pays comme les Pays-Bas et la Suisse autorisent les interruptions uniquement pendant les pauses naturelles des événements sportifs.
Volume de Publicité (Article 23)
La directive limite la part de la publicité télévisée et du téléachat à 20 % du temps d’antenne pour les périodes 06:00-18:00 et 18:00-00:00.
- Niveau de détail : Vingt pays ont introduit des modifications à cette règle de base.
- Variations nationales :
| Pays |
Règle sur le volume publicitaire |
| Règle de la Directive SMA | 20 % par période (06:00-18:00 et 18:00-00:00) – adoptée par 19 pays. |
| Autriche | PSM : 42 min/jour. Autres chaînes : 20 %/heure. |
| Allemagne | PSM : 20 min/jour en moyenne annuelle (pas après 20h). Autres chaînes : 20 % par période. |
| France | TV terrestre : 9 min/heure en moyenne (max 12 min). |
| Royaume-Uni | PSM : 7 min/heure en moyenne. Autres chaînes : 12 min/heure en moyenne. |
| Pays-Bas | PSM : 5 % du temps de programme annuel. Autres chaînes : limites annuelles (10 %), quotidiennes (15 %) et par période (20 %). |
| Italie | TV en clair : 20 % par période. TV payante : 15 % par période. |
- Exemptions étendues : Neuf pays ont élargi la liste des contenus exclus du calcul du quota (auto-promotion, parrainage, etc.) pour y inclure des messages d’intérêt public, des appels à la charité ou la promotion d’œuvres européennes (BG, CZ, DE, ES, IS, LV, PT).
Autorégulation
La Directive SMA encourage activement les États membres à promouvoir des codes de conduite pour les CCA concernant les boissons alcoolisées et les aliments et boissons HFSS.
Mise en Œuvre nationale
La responsabilité de l’élaboration de ces codes varie considérablement :
- Fournisseurs de services de médias : Obligatoire dans des pays comme la République tchèque et l’Italie.
- Autorités Nationales de Régulation (ARN) : Obligatoire en Belgique (FR), en Irlande et au Royaume-Uni.
- Organismes d’Autorégulation (OA) : Obligatoire dans des pays comme l’Autriche et la Pologne.
- Encouragement par les ARN : L’ARN est chargé d’encourager la création de codes dans des pays comme l’Espagne et la Finlande.
Codes de conduite des plateformes de partage de vidéos (PPV)
Conformément à l’article 28b(2), les PPV ont développé leurs propres codes de conduite. Des plateformes comme Meta (Facebook, Instagram), YouTube et TikTok ont des politiques publicitaires qui interdisent ou restreignent la promotion de certains biens et services, luttent contre les pratiques trompeuses et exigent une divulgation claire des CCA.