Jeunes & plateformes numériques

L’ARCOM vient de publier une étude quantitative, qualitative et sémiologique analysant les usages et pratiques des jeunes sur les plateformes numériques (réseaux sociaux, messageries, plateformes vidéo, jeux), la nature et l’ampleur des risques auxquels ils sont exposés et la manière dont ils y font face.

 

 

99% des 11-17 ans utilisent au moins une plateforme en ligne plateforme en ligne avec une moyenne de 3,6 plateformes consultées quotidiennement. L’entrée dans cet univers est de plus en plus précoce, 44 % commençant à utiliser les réseaux sociaux avant l’âge de 13 ans. Pour contourner les limites d’âge, 62 % des mineurs admettent avoir menti sur leur âge, démarche facilitée par des processus de vérification souvent lacunaires sur les plateformes.

3 motivations principales :

  1. Besoin d’appartenance et de lien Social : Les plateformes sont une extension de la vie sociale réelle. Elles sont indispensables pour rester connecté à ses amis, intégrer les groupes de discussion et suivre les tendances. Ne pas y être présent est synonyme d’isolement et d’exclusion;
  2. Recherche de divertissement et d’évasion : Les plateformes offrent un accès illimité à des contenus personnalisés (humour, gaming, musique, sport) qui créent une “bulle” réconfortante. La posture est majoritairement passive : 87 % regardent des contenus, mais seuls 30 % publient régulièrement;
  3. L’accès à l’information : Les réseaux sociaux sont la source d’information principale, voire unique, des mineurs pour l’actualité, la politique ou les tendances culturelles, supplantant les médias traditionnels.
Chaque plateforme répond à des usages spécifiques, avec une domination de quelques acteurs majeurs :
Plateforme
Usage Quotidien (11-17 ans)
Motivations
Risques Associés (Quali/Sémio)
YouTube
58 %
Divertissement et information, contenus plus “qualitatifs” et longs. Plateforme jugée la plus sûre (note de 7,9/10).
Contenus inadaptés (ElsaGate), hyperconnexion perçue comme “moins pire”.
Snapchat
51 %
“Couteau-suisse” : messagerie instantanée, stories, localisation, “flammes” addictives. Populaire chez les collégiens.
Temps d’écran excessif, localisation, contact avec des inconnus via “ajout rapide”, diffusion non consentie d’images.
TikTok
49 %
“The place to be”, très addictif en raison de son algorithme (“doomscrolling”), formats courts.
Temps d’écran, contenus inadaptés (porno caché, défis), cyberharcèlement, désinformation. Perçue comme l’une des plus risquées.
WhatsApp
48 %
Échanges avec les cercles connus (famille, amis). Jugée la plus sûre des messageries (note de 8,1/10).
Risques quasi nuls, sauf diffusion de contenus inadaptés dans des groupes de classe.
Instagram
44 %
Échanges, stories, information. Plus populaire chez les lycéens (“pour les grands”). Pression sur l’image et la e-réputation.
Pression sociale (standards de beauté), perte de confiance en soi, cyberharcèlement, piratage de comptes.
Discord / Roblox
9% / 17%
Échanges liés au gaming, communautés, jeux. Public majoritairement jeune et masculin.
Interactions avec des inconnus / adultes mal intentionnés, arnaques, contenus inappropriés.
Telegram
Très peu cité
Associé à l’illégalité et aux contenus “chocs” et violents.
Contenus violents et pornographiques, hacking. Perçu comme “le réseau social le plus dangereux”.

83 % des mineurs sont exposés régulièrement à au moins un risque en ligne. L’hyperconnexion (72 % d’exposés réguliers) et les contenus choquants (48 %) sont les plus répandus. Si les adolescents tendent à banaliser ces risques fréquents, ils perçoivent comme très graves le cyberharcèlement et les contacts avec des adultes mal intentionnés, qui ont l’impact le plus négatif sur leur bien-être. L’analyse révèle également qu’un quart des adolescents ont été à la fois auteurs et victimes de cyberharcèlement.

Risque
Exposition Régulière (Souvent/De temps en temps)
Impact sur le Bien-être (note /10)
Principales Observations (Synthèse Quali/Quanti/Sémio)
Hyperconnexion
72 % (dont 33% “souvent”)
6,7
Risque le plus répandu et le plus banalisé. Conscience de l’addiction (“shots de dopamine”, algorithmes) mais difficulté à s’autoréguler. 42% sont “gravement exposés” (exposition régulière et fort impact).
Contenus Inadaptés
48 % (dont 15% “souvent”)
6,3
Violence, pornographie “cachée”, discours haineux, défis. Risque fréquent mais banalisé (“ça me choque même plus”). 26% sont “gravement exposés”. Les filles sont plus exposées aux contenus sur les troubles alimentaires, les garçons à la pornographie.
Cyberharcèlement
16 %
7,2
Risque très présent à l’esprit (forte sensibilisation scolaire) mais minimisé en l’absence d’exposition directe. 11% sont “gravement exposés”. Fait notable : 24 % des mineurs ont été à la fois victimes et auteurs.
Adultes mal intentionnés
14 %
7,2
Sollicitations, demandes de photos, propositions de rencontre. Risque perçu comme rare mais très grave. Les filles sont plus exposées (18 %). L’impact émotionnel est fort, souvent vécu dans l’isolement et la honte. 10% sont “gravement exposés”.
Arnaques / Piratage
15 %
6,3
Phishing, vol de comptes, fausses offres. Risque bien identifié et très répandu dans l’entourage. Les garçons sont plus touchés (17 %). 8% sont “gravement exposés”.
Défis Dangereux
26 %
5,9
Les mineurs sont plus spectateurs qu’acteurs. Ils estiment avoir le recul nécessaire pour ne pas y participer. L’impact est perçu comme plus faible, mais 13% sont “gravement exposés”.
E-réputation
Peu de données quanti.
N/A
Risque peu conscientisé par les plus jeunes, mais appréhendé par les lycéens (impact sur le futur emploi). Pression sociale forte sur Instagram pour maintenir une “vitrine” parfaite.

 

Bien que 94 % des parents instaurent des règles (téléphone interdit la nuit, temps d’écran limité, etc.) et 67 % utilisent un outil de contrôle parental, près de la moitié des adolescents (45 %) admettent contourner ces règles (falsification du temps d’écran, modification du mot de passe parental, utilisation du téléphone des parents, vol de carte d’identité pour la vérification d’âge). L’étude sémiologique confirme que sur des plateformes comme Instagram, Snapchat et Facebook, il suffit de modifier son âge après un premier échec pour créer un compte. Le dialogue, pratiqué par 64 % des parents est un facteur clé, mais les parents sous-estiment souvent l’exposition réelle de leurs enfants aux risques.

Les outils de protection existent mais leur efficacité est variable. Le signalement est connu par 61 % des mineurs mais utilisé par seulement 31 %, avec une satisfaction mitigée quant aux réponses apportées (~50 %). L’étude sémiologique montre que si la prévention est forte pour certains risques (suicide, troubles alimentaires), elle est faible, voire inexistante, pour d’autres (défis dangereux, arnaques).

Plus de la moitié des adolescents (53 %) souhaitent être mieux accompagnés et protégés. 45 % estiment que les plateformes n’en font pas assez. Les attentes se concentrent sur un renforcement de la modération (notamment humaine), une vérification d’âge plus stricte, des outils plus efficaces et une sensibilisation accrue portée par des figures crédibles (influenceurs, experts) et débutant dès l’école primaire.

 

https://www.arcom.fr/se-documenter/etudes-et-donnees/etudes-bilans-et-rapports-de-larcom/protection-des-mineurs-en-ligne-quels-risques-quelles-protections

 

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